Liste des articles
Capital
Partager sur :
Vue 91 fois
15 février 2022

6 idées reçues que vous avez (peut-être) sur la reconversion professionnelle

 

La reconversion professionnelle ne se réduit pas à un changement radical de carrière, impliquant formation longue, diplômes et maturation d’un projet durant plusieurs années. Les parcours de reconversion sont divers et peuvent s’opérer à tout âge.


 

Le modèle classique de carrière professionnelle, consistant à passer de nombreuses années dans la même entreprise ou au même poste, fait de moins en moins rêver les Français. Rarement la reconversion professionnelle n’a été autant sollicitée par les salariés : selon un rapport de France compétences, publié en ce début d’année 2022, un tiers des actifs l’auraient expérimenté au cours de leur carrière. De nombreux dispositifs d’accompagnement et de financement sont aujourd’hui disponibles pour aider les individus à prendre un virage professionnel, à monter leur propre entreprise ou à s’épanouir dans un nouveau métier. La crise sanitaire et la généralisation du télétravail poussent notamment un nombre croissant d’actifs à se questionner sur le sens de leur travail et ses conditions d'exercice, sur leur vocation et sur l’équilibre entre leur vie personnelle et professionnelle.

Afin d’analyser les nouveaux parcours de reconversion professionnelle des Français, l’institution publique France compétences a réalisé une étude auprès d’actifs ayant débuté ou terminé une reconversion professionnelle entre 2016 et 2021*. La conclusion principale de ce rapport, publié ce mardi 1er février, est claire : il n’y a pas de modèle unique de reconversion professionnelle. Cette dernière n’est pas réservée à une catégorie d’actifs, et peut prendre de nombreuses formes. Pour déconstruire les clichés qui entourent la reconversion professionnelle et qui pourraient freiner vos envies de changement, voici les principales idées reçues qui viennent spontanément lorsqu’on parle de reconversion. Et qui, statistiquement, s’avèrent fausses.

“La reconversion professionnelle concerne uniquement les actifs ayant une longue carrière derrière eux”

Non, les changements de carrière ne s’effectuent pas nécessairement après de longues années d’exercice de la même activité professionnelle. Bien plus qu’auparavant, les jeunes générations seraient “enclines au changement”, et les reconversions s’observent dès les premiers temps de la vie professionnelle. Dans l’étude réalisée par France compétences, les jeunes (25-35 ans) sont justement sur-représentés par rapport à leur poids dans la population générale de référence (35% contre 24%). La part des 18-24 ans est également notable (13%). Comment expliquer ce phénomène ? “Ces reconversions précoces peuvent correspondre à une volonté de résoudre des difficultés d’insertion ou à un désir de se réorienter vers une profession plus riche de sens ou de satisfaction”, éclaire Béatrice Delay, responsable de l’évaluation des études qualitatives au sein de la direction observation évaluation de France Compétences. La reconversion professionnelle ne suppose donc pas d’être en poste depuis un certain temps : il est possible de se reconvertir alors même que l’arrivée dans une entreprise ou sur le marché du travail est récente.

“L’obtention d’un diplôme ou d’une formation certifiante est indispensable à la reconversion”

Si le recours à la formation reste majoritaire chez les actifs en reconversion professionnelle, il n'est pas systématique. Selon l’étude de France compétences, 40% des personnes en reconversion ne passent pas par une formation. Cette dernière est davantage utilisée lorsque la reconversion implique un changement de métier que lorsqu’il y a seulement un changement de statut. Selon Béatrice Delay, la formation peut correspondre à des finalités qui ne sont pas forcément liées à l’acquisition de compétences : “La formation peut être désolidarisée de son contenu et être perçue comme une stratégie pour rendre son profil plus attractif auprès des employeurs, pour accroître son pouvoir de négociation sur le marché du travail.” On observe également des actifs qui ne désirent pas suivre de formation. Et ce, pour deux raisons principales : le refus de retourner sur les bancs de l’école ou la crainte de ne pas valider la certification à l’issue de la formation. “Contrairement à une vision uniforme que l’on peut avoir, la formation longue et certifiante n’est pas le seul modèle en termes de parcours. Parfois, la formation est courte et non certifiante”, complète Béatrice Delay.

“La formation doit s’effectuer avant le recrutement dans une nouvelle entreprise”

Contrairement aux idées reçues, “une formation peut intervenir postérieurement à l’entrée dans l’emploi visé”, signale la spécialiste. En effet, les formations avant d’intégrer le nouvel emploi ne sont pas systématiquement requises. Dans de nombreux cas, le suivi d’une formation peut se faire après le recrutement. Un tiers des reconversions professionnelles externes à l’entreprise se réalisent directement dans la structure d’arrivée, au sein de laquelle les salariés trouvent alors des ressources pour acquérir de nouvelles compétences. “L’employeur peut décider de s’attarder davantage sur l’appétence et les compétences comportementales du candidat. Il se chargera alors de rendre possible, au sein de sa structure, les apprentissages techniques”, indique Béatrice Delay. Les entreprises seraient-elles donc devenues moins exigeantes quant à la détention de diplômes ou de certifications ? Il est difficile d’en tirer une conclusion générale, mais les pénuries de main-d'œuvre et les difficultés de recrutement évoquées par les employeurs peuvent notamment expliquer cette nouvelle dynamique en place dans le recrutement.

“La reconversion professionnelle implique nécessairement un changement de métier ou d’entreprise”

Alors que l’on a tendance à associer reconversion professionnelle et changement de métier, ce dernier ne concerne que 53% des virages de carrière. “C’est loin d’être le modèle unique de reconversion, souligne Béatrice Delay. On observe des reconversions beaucoup plus discrètes, avec des inflexions moins radicales.” Il est par exemple possible de se reconvertir en passant du statut de salarié à celui d’indépendant en conservant le même métier, ou plus rarement du statut d’indépendant à salarié. Il est également envisageable de se reconvertir en restant salarié de son entreprise d’origine. Selon l’étude de France compétences, un quart des reconversions s’opèrent au sein de la même entreprise. On appelle cela le “marché interne”, c’est-à-dire le fait de pouvoir évoluer au sein de son entreprise, notamment à travers une promotion. “Ce modèle continue à perdurer, mais il est nécessaire de souligner que ce type d’opportunité n’est pas distribué de manière aléatoire : il concerne surtout des diplômés et cadres”, note Béatrice Delay.

“La reconversion professionnelle s’effectue forcément sur un temps long de réflexion”

Quand on parle de reconversion professionnelle, on pense spontanément à la concrétisation d’un projet résultant de plusieurs années de réflexion. La reconversion impliquant de nombreux facteurs, qu’ils soient financiers, familiaux ou d’ordre personnel, ce modèle de reconversion dit “vocationnel” continue d'exister. En revanche, de nombreux salariés entament une reconversion professionnelle sans pour autant avoir construit un projet sur plusieurs mois, voire années : pour 42% des personnes interrogées, il s’est déroulé seulement quelques semaines entre l’idée de la reconversion et l’engagement dans un parcours. “Les temporalités longues sont loin d'être systématiques. On observe également des stratégies dites ‘opportunistes’, au sens où la formulation du projet professionnel s’est réalisée le plus souvent suite à une rencontre”, détaille Béatrice Delay. Dans ce dernier cas, après l’ouverture d’une nouvelle opportunité professionnelle, les reconversion s’opèrent généralement sur un temps plus court. Les reconversions impliquant un changement de métier, de leur côté, s’effectuent généralement sur un temps plus long.

“Il n’y a que deux types de reconversions professionnelles : les ‘volontaires’ et les ‘subies’”

“Concernant la reconversion professionnelle, les frontières sont bien plus poreuses que ce qu’on peut imaginer à première vue”, note Béatrice Delay. En effet, la tendance a été jusqu’ici d’opposer les reconversions professionnelles dites “volontaires” aux reconversions “subies”, en cas de perte d’emploi. La reconversion est en réalité multifactorielle, plusieurs raisons pouvant motiver l’engagement dans un changement de carrière (une nouvelle opportunité, des raisons familiales, etc.). Il convient néanmoins de souligner que l’insatisfaction au travail reste le motif le plus courant de la reconversion professionnelle, évoqué par 84% des personnes en reconversion. Cette insatisfaction peut être liée aux conditions de travail, à la rémunération ou encore à la perte de sens ou d’intérêt. "En général, les moteurs invoqués pour se reconvertir conjuguent la volonté de rompre avec une insatisfaction voire une souffrance, et l’envie d'accéder à davantage de satisfaction ou à un meilleur équilibre de vie”, explique Béatrice Delay.

Source "Capital"

Auteur

Commentaires

Aucun commentaire

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire. Connectez-vous.